lundi 8 avril 2013


Lorsque la pédagogie s’oppose aux relations de travail, quel choisir?

À Beauce Appalaches, dans le programme de sciences humaines, depuis plusieurs années, quelques enseignants qui donnent des cours de quatrième session procèdent courageusement à l’éclatement de leurs cours. C’est-à-dire qu’ils bâtissent avec les étudiants des horaires de rencontres individualisées après quelques semaines de cours et suspendent le cours comme tel. Il n’y a donc plus de rencontres en classe mais plutôt des rencontres d’équipe, une par une! Pour le prof, c’est un alourdissement de la tâche très  importante. Généralement, au lieu d’une prestation de  trois heures/semaine, cela signifie plutôt entre 6 et 8 heures. Ces profs-là entrent donc le matin à 8h00 et ressortent le soir vers 16h30 - 17h00. Même la période de dîner ne permet pas de souffler puisque les étudiants tournent autour de ces profs comme des vautours affamés … de connaissances ;- )

Pédagogiquement parlant, c’est assez intéressant. Les profs réussissent à faire faire des travaux de fort calibre aux étudiants. Des recherches intelligentes sur les moteurs de recherche (Eureka, Repère, Cairns, etc…), des médiagraphies, des citations et des notes de bas de page bien faites, une problématique  bien documentée, un texte bien structuré, bref, les étudiants finissent par faire un travail de recherche fort acceptable. De plus, certains profs les forcent à présenter leurs résultats en séminaire avec l’aide d’un Powerpoint ou d’un Prezi accrocheur. D’autres font faire des affiches qu’on expose dans le corridor du département. Et ils insistent ad nauseam sur la qualité du français…

Lorsqu’on discute de cette façon de faire avec les étudiants, ils apprécient cette approche bien que ça augmente aussi leur charge de travail.  Ils en retirent une plus-value – et le reconnaissent.

Maintenant, depuis quelques années, plusieurs acteurs du milieu ne semblent pas apprécier cette façon de faire – à la grande déception de ces profs. D’abord, mal informés, certains profs de d’autres départements voient cette méthode pédagogique d’un mauvais œil. La classe étant vide, ils croient que les profs ne travaillent pas! Cela va s’en dire toute la frustration que cela crée chez les profs qui procèdent de cette façon. Certains parents  croient que leurs enfants ont terminé prématurément leur cours, puisqu’ils ne rencontrent plus leur professeur aux heures prévues dans l’horaire. Une autre frustration… Et maintenant, le syndicat et la Direction des études s’en mêlent, prétextant que cette approche pédagogique ne respecte pas à la lettre la convention collective et le REC (Régime de l’enseignement collégial). En effet, chaque étudiant inscrit au cours a droit à ses 45 heures contacts avec son enseignant. Or, en éclatant le cours dans le milieu de la session pour faire des rencontres individualisées par équipe d’une demi-heure, l’étudiant n’a pas formellement ses 45 heures. Dans le calcul de la tâche, cela pose problème concernant les PES (périodes-étudiants-semaine.

Maintenant, cette approche pédagogique produit des fruits! À Beauce-Appalaches, lors de notre évaluation de programme, on a constaté que nos étudiants réussissaient mieux à l’université, qu’ils étaient plus persévérants et qu’ils étaient mieux orientés. Donc, organisé comme il est, notre programme fait du bon travail! Alors, pourquoi briser une formule gagnante? Que doit-on privilégier ici? La convention collective ou l’approche pédagogique qui a fait ses preuves?

Et chez vous, dans votre collège, cette formule des cours éclatés est-elle utilisée? Si oui, est-ce que le syndicat et la Direction des études s’en sont  mêlés? N’hésitez pas à commenter… Merci.

4 commentaires:

  1. La formule des enseingant(e)s de Lennoxvile est semblable et nous n'avons pas de plaintes de la direction.

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  2. Chez nous aussi (un cégep montréalais dont je n'ose publier le nom...) on fonctionne de cette façon et pour l'instant, tout va très bien. Pas de plainte des étudiants ou de la direction, et effectivement, un bien meilleur encadrement!

    Je pourrais faire le même travail d'encadrement avec toute la classe, pour que tout le monde ait droit à son 3h, mais on ne s'entendrait pas parler, la moitié des étudiants ne travaillerait pas à son projet et l'autre moitié serait dérangée par le bruit ambiant...Bref, je n'aurais pas le temps de voir tout le monde, je manquerais aussi de concentration et les projets s'en ressentiraient!!

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  3. L'un de mes cours de géographie au Collège Shawinigan était monté sur ce principe et intégrait le blogue comme outil pédagogique. Très apprécié des étudiants en profil Regard sur le monde, il me demandait en réalité beaucoup plus de travail que les cours traditionnels.

    Ce cours a depuis été éliminé récemment pour des raisons qui n'ont rien à voir avec ses qualités pédagogiques et n'a jamais fait l'object de critiques internes provenant de la direction, de collègues ou d'étudiants. C'était au contraire l'un des cours dont j'étais le plus fier et qui avait beaucoup de potentiel.

    Quelques autres cours fonctionnent aussi de cette manière dans mon programme et sont tous des succès préparant bien les étudiants à l'université. Nous avons régulièrement de bons commentaires à cet effet de nos anciens étudiants.

    Pour ce qui est de votre autre point, je suis d'avis que la convention collective (dont la règle de l'ancienneté comme unique critère d'attribution des tâches) est parfois un frein pour certains profs qui désirent en faire plus ou ont de nombreuses idées.

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  4. À Montmagny, ce fonctionnement pédagogique est utilisé dans les cours multi 300 (IPMSH et DIASH). C'est même écrit dans les plans de cours. Tout est fait dans l'horaire pour que dans ces cours l'encadrement puisse se faire après la 3e, la 5e ou la 8e semaine (selon que c'est un cours de DIASH stage, projet ou un cours d'IPMSH). La direction est au courant, le secrétariat est au courant (afin de pouvoir rejoindre les étudiants en cas d'urgence) et la conseillère pédagogique nous encorage à mieux encadrer les étudiants de cette façon.

    Je considère qu'acec cette approche pédagogique, mes étudiants reçoivent beaucoup plus qu'en classe, ce qui me permet, de temps en temps, de faire de même dans mes cours d'histoire. Dans le cas d'un cours d'histoire, c'est le fait de quelques semaines dispersées dans la session. Mais il reste que je peux, comme enseignant, mieux voir à la compréhension de la matière.

    Continuez d'inover à Saint-Georges. Peut-être alors que la bureaucratie va comprendre que ce que vous cherchez, c'est la réussite de vos étudiants.

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