mardi 5 février 2013

Le programme Arts et Lettres change de nom. On parlera dorénavant du programme «Culture et Communication». Est-ce une bonne chose? Pas sûr!!!


Comme tous les programmes collégiaux, Arts et Lettres a été révisé. La procédure a suivi son cours. Comme pour tous les programmes pré-universitaires, on a demandé aux universités quelles sont leurs attentes. On a consulté les acteurs qui évoluent dans le programme. Le Comité-conseil du programme a été impliqué à toutes les étapes du processus... À la suite de ces consultations, et après des discussions animées, on a fini par bâtir un projet de réforme. Ainsi, le programme révisé d’Arts et lettres deviendra «Culture et communication».

Affirmons d’emblée que la révision du programme a amené plusieurs améliorations - sans contredit. Soulignons d’abord que le nombre d’unités et le nombre d’heures d’enseignement seront augmentés, ce qui est non négligeable. L’apprentissage des Arts et des Lettres méritent autant d’heures d’enseignement que l’apprentissage des sciences humaines.

Il vaut aussi la peine de mentionner que la carte des options du programme sera augmentée. On retrouvera dorénavant sept options – au lieu des deux actuel.(1) Cela vient préciser davantage les parcours d’études propres au programme. Ce n’est certainement pas une mauvaise idée. À lire les PV des comités, il semble que les discussions sur les options ont été longues et que le consensus a été difficile à obtenir. On discute encore du profil Arts, trop flou encore.
Les étudiants qui suivront ces différents parcours auront néanmoins un tronc commun plus élaboré. À nos yeux, il s’agit là du cœur de la réforme. Il y aura six objectifs communs au lieu des trois actuels. Les trois objectifs communs du programme actuel sont :
  1. Explorer le domaine des arts et le domaine des lettres;
  2. Situer les courants déterminants du domaine des arts et du domaine des lettres:
  3. Intégrer des connaissances et des habiletés acquises dans le programme.
Ils seront remplacés par :
  1. Appliquer des méthodes permettant l’étude en culture et communication;
  2. Expliquer les caractéristiques essentielles d’un domaine en culture et communication;
  3. Expliquer des enjeux culturels nationaux;
  4. Fonder un jugement critique;
  5. Apprécier la diversité culturelle contemporaine;
  6. Démontrer l’intégration personnelle d’acquis en culture et communication.



 

L’élaboration des objectifs du tronc commun n’a pas été simple. Diverses conceptions des arts, des lettres et des langues se sont affrontées. Certains ont défendu une approche plus «pratique et créative» plutôt qu’une approche jugée trop théorique du programme. D’autres n’ont pas apprécié la couleur «sciences humaines» que prenait le programme révisé.(2) Enfin, certains ont déploré la marginalisation des langues dans le nouveau programme.






À nos yeux, toutes ces tensions s’incarnent carrément dans le nouveau titre du programme : «Culture et communication». Nous nous interrogeons beaucoup sur le choix de ce titre, bien que nous comprenions les intentions de départ. Bien sûr, les deux concepts (culture et communication) ont l’avantage de couvrir tous les domaines d’étude du programme. Mais, en s’élevant dans l’abstraction, les concepts perdent aussi de vue la substance même du programme ; ils ne représentent plus la réalité du terrain. De plus, ils empiètent sur d’autres réalités, notamment celle des sciences humaines. Cela risque de causer un flou artistique qui pourrait amener des tensions – voire des conflits. En général, la culture et les communications réfèrent à l’univers des sciences humaines. Ce sont des normes culturelles occidentales que de situer ces «objets» dans le champ d’études des sciences humaines.
Nous comprenons qu’il faille trouver un nom de programme qui représente l’ensemble des domaines d’étude. Mais rappelons que, parmi les 7 options du nouveau programme, il y a les arts, le Cinéma, la littérature et le théâtre! 4 options sur les 7 se situent dans le domaine des arts! Alors pourquoi ne pas avoir conservé le générique «art» dans le libellé du programme ? Pourquoi pas un programme intitulé Arts, Langues et Lettres ? Ou encore Arts, Langues et Communications ? Ou encore Arts, langues et création médiatique. Car, il faut bien se rendre à l’évidence; il y a bel et bien trois volets à ce programme.
En le nommant «Culture et communication», on ne rend certainement pas justice à ce programme. «Culture et communication», c’est une fausse représentation de ce qu’est véritablement ce programme. «Culture et communication», c’est un profil de sciences humaines, rien d’autres… Dommage qu’on persiste à conserver ce nom car la réforme avait beaucoup de bien. Malheureusement, ce titre ne tient même pas compte de tout ce travail accompli. Dommage…
________
(1) Note : Les deux options actuelles sont : 1) Arts et lettres; 2) Langues. Ces options seront
      remplacées par :         
        1) Multidisciplinaires, 2) Arts; 3) Cinéma; 4) Langues; 5) Littérature; 6) Médias; 7) Théâtre
(2) Note : D’ailleurs, il semble bien qu’on ait réalisé cette dérive en corrigeant le libellé de certains
      objectifs du tronc commun ainsi que certains critères de performance.  Mais il n’en demeure pas
      moins que la couleur «sciences humaines» demeurent – probablement pour satisfaire aux
      attentes des universités.
 
 
Michel Huot pour le RSHCQ

4 commentaires:

  1. Merci pour cette intervention, je suis d'accord avec les commentaires sur le titre du programme et de l'option Arts.
    Cela pourrait causer de la confusion sur le mandat du programme et sur la perception des étudiants; autant pour l'utilisation du terme Culture qui est beaucoup plus large que Arts et qui couvre une partie du champs des sciences humaines; que le terme Arts pour le titre d'une option qui inclut au moins 4 des autres options.

    Gilbert Boyer
    Enseignant Arts et lettres
    CEGEP Bois-de-Boulogne

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  2. Le MELS a choisi de faire la réforme Arts & Lettres tout de suite après celle amorcée en Arts Plastiques. Il m'est toujours apparu étrange que arts plastiques ne soit pas parti prenante de Arts & Lettres. Étrange affaire historique... Ainsi comme le nouveau programme portera le nom de Arts visuels, le Mels a senti, dans sa grande sagesse, qu'il y aurait probablement de la confusion pour les étudiants entre les deux programmes si le mot art se retrouve dans le titre de deux programmes. Cette grande précaution tient plus de l'entêtement que de la prudence, à mon humble avis. D'autant qu'aucun membres du secteur arts visuels n'était au comité de réforme de Art & Lettres. Alors, pourquoi cet entêtement à maintenir ce libellé de programme alors que majoritairement, les départements ont manifesté leur désir d'intégré le mot Arts ou Création à ceux de Culture et Communication afin de bien manifester l'apport de la pratique des arts. Serait-ce du mépris de la part des membres du comité pour les arts visuels? Serait-ce de la pression venant du groupe Arts plastiques nouvellement nommé Arts visuels ? Ou serait-ce parce que les gens qui orchestrent cette réforme proviennent des sciences humaines. Ou encore est-ce parce que les membres du comité ignorent les particularités de la pratique des arts au point d créer un programme essentiellement orienté vers la réflexion théorique?

    Bertrand Carrière
    Enseignant en Arts et Lettres
    CÉGEP André-Laurendeau

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  3. Vous avez tout à fait raison en ce qui concerne cette dérive vers les sciences humaines dont témoigne le titre du nouveau programme AEL (devenu CC), et ce, d'autant plus que cette dérive est confirmée par les nouvelles compétences et les nouveaux plans-cadre qui insistent notamment sur l'enseignement de méthodes ou d'approches théoriques (telles que que la sociocritique, la sémiotique, etc.) qu'il vaudrait mieux, selon moi, laisser à nos collègues universitaires (qui, sinon, n'auront plus rien à enseigner!;-)).
    Cette dérive témoigne, je crois, d'une confusion entre le domaine des sciences humaines (psychologie, sociologie, anthropologie, sciences politiques...) et celui de ce qu'on pourrait appeler, comme chez nos voisins anglo-saxons, les "humanités" (arts, lettres, etc.) Il me paraît primordial de préserver la spécificité de cette sphère à la fois artistique et "humaniste" de connaissances et de pratiques qui ne recoupe pas toujours le territoire plus "scientifique" (et déjà suffisamment vaste!) des sciences humaines.

    Jean-François Vallée
    Arts et Lettres
    Collège de Maisonneuve


    P.-S. Je me permets de signaler deux fautes similaires dans votre texte (désolé, réflexe de prof):
    1 (fin du paragraphe 2) - "L’apprentissage des Arts et des Lettres méritent... " (mérite)
    2 (note 2) - "la couleur «sciences humaines» demeurent.." (demeure)

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    1. En toute humilité, je dois reconnaître que vous avez raison. Deux accords de verbe mal foutus,... J'apprécie votre réflexe.

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