lundi 29 octobre 2012

Arts et Lettres ou Culture et Comminication???


Le programme Culture et communication  alias  Arts et lettres : le changement de nom se concrétise…

Concernant le projet de refonte du programme Arts et lettres, à la suite d’une consultation assez large, il semble que la version définitive du nouveau programme sera prête pour les Fêtes. Pour l’instant, au MELS, une équipe travaille à rajuster la version préliminaire de ce programme qui tiendra compte de certains commentaires émanant du réseau. Le titre Culture et communication (500.xx) ne fait pas l’unanimité, mais on maintient le cap pour l’instant, malgré les critiques soulevées. En ce qui a trait aux effets que ce choix aura sur le programme Sciences humaines, cela reste à voir. Cependant, les programmes universitaires en communication font largement appel aux sciences humaines, dans leur démarche scientifique notamment. Il est clair que le choix des concepteurs du nouveau programme, qui valorise la nouveauté, ne respecte pas les compétences des sciences humaines et empiète, à sa face même, sur notre champ d’études.  
 
 
Le printemps dernier, une lettre[1] a été adressée à la Direction des études collégiales pour présenter le point de vue du comité d’enseignants et d’enseignantes des sciences humaines.  Également, des pressions ont été faites sur les directions des études, dans plusieurs collèges, par les coordinations de programme de Sciences  humaines --- parfois aussi par les coordinations d’Arts et lettres qui ne sont pas en accord avec ce changement--- pour tenter de faire modifier le titre proposé du programme et le libellé de quelques compétences. Il n’est pas trop tard pour effectuer de nouvelles pressions sur votre direction des études, pour faire valoir le sentiment d’empiètement sur les compétences de sciences humaines et le risque de conflit qui pourrait en découler… Sans monter aux barricades, reste que, encore une fois, les sciences humaines se font dépouiller sans que cela ne choque personne… Que dire également de la disparition des Lettres de l’offre de programmes au niveau collégial??? Restera le petit programme Sciences, lettres et arts pour représenter ce vaste champ d’études… Y a de quoi s’interroger et s’indigner…   
 
 
N’hésitez pas à signifier votre désaccord et à exiger une intervention auprès du MELS. Il faut signifier clairement, possiblement par l’entremise de votre comité de programme ou en amenant le sujet à votre Commission des études, que les professeurs des Sciences humaines n’apprécient pas la situation et s’opposent à cette orientation! Éventuellement, dans nos cégeps respectifs, pourquoi ne mettrions-nous pas sur pied des profils Communication en Sciences humaines? Cela montrerait peut-être le côté absurde de la situation?  Si nous ne disposons que de peu de pouvoir pour influencer le processus de révision d’un programme, surtout lorsque ce n’est pas le nôtre, nous avons, à tout le moins, le pouvoir de ne pas nous laisser damer le pion sans rien dire!  
 
Claire Denis 
Cégep de Sherbrooke
Responsable du Comité d’enseignants et d’enseignantes du programme préuniversitaire
Sciences humaines
 
P.S.: Pour ceux qui veulent suivre cette refonte du  programme d'Arts et Lettres, voici de bonnes  adresses pour alimenter votre réflexion :
 


[1]  Si vous souhaitez une copie de cette lettre, demandez à votre coordonnateur de programme qui est habituellement celui ou celle qui représente votre collège au Comité d’enseignantes et d’enseignants du programme Sciences humaines. Vous pouvez également communiquer avec moi pour en obtenir une copie.  

mardi 9 octobre 2012

Écoutez cela - ça fait du bien aux sciences humaines !

Liz Coleman, présidente de l'université Bennington au Vermont, appelle à une réforme en profondeur des sciences humaines. Un discours de 18 minutes qui fait réfléchir... Rapidement résumé, disons qu'elle croit que, pour plusieurs raisons qu'elle mentionne dans son discours,  les sciences humaines n'assument plus leur fonction première : conscientiser la population et s'attaquer aux grands problèmes contemporains par l'action citoyenne... 

Elisabeth Coleman

Des développements dans le projet du monorail Trens-Québec

Depuis le début du blog, nous suivons l'aventure du monorail Trens-Québec. 

Depuis l'élection du PQ, les acteurs du  projet semblent enthousiastes - comme vous pouvez le constater dans ce courriel :
 
 
Bonjour cher(e) ami(e),
Nous avançons dans la réalisation du monorail TrensQuébec.

M. Claude Béland, ex-président du Mouvement Desjardins, fait partie de notre équipe pour que le TrensQuébec devienne une Coopérative Nationale de Transport. Celle-ci sera lancée bientôt.

Au mois d'octobre nous rencontrons les gens d'Investissement Québec pour préciser le montage financier.

Le nouveau Conseil des ministres contient plusieurs ministres favorables au TrensQuébec, dont J.-F. Lisée, Daniel Breton, Martine Ouellet et Stéphane Bergeron. Plusieurs députés sont également favorables, autant du PQ que de la CAQ. Dans ce sens, pourriez-vous nous rendre un immense service ?

Pourriez-vous envoyer un court message à votre député nouvellement élu pour l'informer et l'encourager d'appuyer le développement du Monorail au Québec ? (Courriel députés)

Aussi, auriez-vous l'obligeance d'envoyer un court message à vos amis internautes pour leur demander de visiter notre site, si ce n'est pas déjà fait ? L'onglet Vidéo donne un aperçu global du projet qui va certainement créer plusieurs milliers d'emplois au Québec.

Plus de 35 500 personnes de partout au Québec ont déjà voté pour le monorail. Avec votre appui, nous allons réussir!

Très sincères salutations,

Jean-Paul Marchand PhD coordonnateur


On redémarre…

Le Réseau des sciences humaines des collèges  du Québec

On  redémarre…

 
Le RSHCQ entreprend sa deuxième année d’existence. Pour lancer cette nouvelle année, l’exécutif du Réseau souhaite rappeler sa raison d’être et préciser la ligne éditoriale de son blogue. Le principal objectif du Réseau est de valoriser les sciences humaines et de créer un espace de discussion concernant les sciences humaines au sens large et, plus spécifiquement, le programme de Sciences humaines du réseau collégial québécois.  Le besoin de veiller à promouvoir, à défendre et à valoriser les sciences humaines est apparu suite à différents constats. En premier lieu, les participants au comité d’enseignants des sciences humaines lié au MELS ont compris que leur capacité d’influencer les processus décisionnels est extrêmement limitée, dans le cadre de cette structure.  Il ne reste que les instances patronales reliées à la Cap (Commission des affaires pédagogiques) et autres lieux de concertation de la Fédération des cégeps comme interlocuteur possible pour le programme Sciences humaines.   Souhaitons-nous réellement nous en remettre uniquement à ces instances pour déterminer les orientations à prendre concernant les sciences humaines?
 
Plusieurs programmes techniques ont des associations disciplinaires susceptibles de se mobiliser et de se concerter au besoin. En Sciences humaines, actuellement, il existe quelques associations disciplinaires fonctionnelles (économie, histoire, psychologie, sociologie…), mais aucune n’est chargée précisément de veiller à la santé du programme Sciences humaines dans le réseau collégial.  Par ailleurs, il est clair que, d’une manière générale, les sciences humaines constituent le parent pauvre de l’enseignement et de la recherche universitaires, étant donné le peu d’applications directes dans les entreprises… Un organisme capable de mobiliser, au besoin, les principaux acteurs du programme et qui crée une voix pour les sciences humaines constitue certes un atout non négligeable. Ceux qui ont à cœur les sciences humaines dans l’univers des sciences, le développement de ce programme et sa place dans les cégeps disposent désormais d’un outil permettant de veiller au grain… 
 
Concernant la ligne éditoriale de notre blogue, il est important de mentionner que les objets de réflexions pouvant être pertinents pour les membres du Réseau sont extrêmement nombreux. En plus des sujets portant sur le programme, les activités pédagogiques ou notre profession, tout ce qui concerne les sciences humaines peut faire l’objet de discussions! Les sujets sont donc pratiquement illimités.  Bien que la ligne éditoriale à privilégier soit surtout celle de l’analyse, reste que la confrontation des idées est grandement souhaitable!  Il n’existe d’ailleurs aucun groupe ou organisation dont les membres présenteraient des opinions unanimes sur tous les sujets… sauf peut-être dans le cas d’une secte… Il ne faut pas avoir peur de présenter des idées et d’en débattre. Ces échanges pourront parfois nourrir notre enseignement ou notre réflexion générale sur diverses questions de société. Ce type d’intervention sur la place publique est facilité par le Web 2.0… Profitons-en!  Il me semble que cela fasse partie de la nature même des sciences humaines de débattre et d’analyser. N’hésitez surtout pas à nous soumettre vos textes.  L’an dernier, nous avons maintenu un rythme élevé de publications… L’enthousiasme nous portait. Notre collègue Michel Huot a été particulièrement productif (et on l’en remercie). Cette année, si nous ne recevons pas davantage de textes en provenance du Réseau, le rythme des communications fluctuera selon l’inspiration et les disponibilités de l’exécutif. 
 
Le Réseau est soutenu par des bénévoles et il a besoin de renfort. Une journée d’étude et une assemblée générale ont été reportées à la suite de la grève étudiante de la session dernière. Espérons que la participation à cette journée, qui se tiendra probablement en janvier, sera à la hauteur de nos attentes. Nous souhaitons que le Réseau se développe, se renforce et que l’intérêt qu’il suscite grandisse. L’enjeu est important, il nous concerne et si nous n’assumons pas cette responsabilité,  personne ne le fera à notre place!!!

 Bonne rentrée et bon courage à nos collègues qui subissent encore les contrecoups de la grève de l’hiver dernier!  

 Claire Denis
Présidente de l’exécutif du RSHCQ
Enseignante  au Cégep de Sherbrooke

dimanche 3 juin 2012

Quand le « modèle québécois » s’effrite, la rue se fait entendre…


Il y a au Québec un modèle de développement socio-économique particulier. En bon vieux langage marxiste, on traduirait «modèle québécois» par «formation économique et sociale». Hérité de la période de la Révolution tranquille, ce modèle fait appel à une implication très importante de l’État québécois dans les affaires économiques et sociales. Plus précisément, le modèle québécois s’est historiquement construit autour de la concertation entre les différents acteurs sociaux et l’État québécois : d’abord les acteurs patronaux et syndicaux, puis, plus tard, les groupes communautaires et les écologistes… 





Ce modèle n’a jamais été statique – évidemment. Très schématiquement, il a connu trois phases de développement :
1.      Les années 1960 -70 : l’État-entrepreneur.
Dans les années 1960, on assiste à une modernisation accélérée de la société québécoise. Au cœur de cette modernisation : l’intervention de l’État du Québec. L’État-providence québécois s’articule autour de nouveaux ministères (Ministère de l’éducation, Ministère des affaires sociales…), et de nouvelles sociétés d’État (Hydro-Québec, Soquem, Soquia, Soquip, Caisse de dépôts et placements, Société générale de financement, Sidbec…)
2.      Les années 1980 – 90 : l’État-partenaire
Les années 1980 s’ouvrent sur une crise économique profonde. Le chômage au Québec monte à près de 20%. L’État reprend le bâton du pèlerin et refait de grands sommets de concertation. Puis, prétextant la crise des finances publiques, l’État cherche à changer de rôle. Il devient plus un partenaire qui accompagne les acteurs économiques (patrons-syndicats, associations communautaires…) qu’un entrepreneur. Plusieurs sociétés d’État sont privatisées. Certaines déréglementations sont entreprises. Les Accords de libre-échange sont signés.
3.      Les années 2000 : l’État essoufflé tenté par le néo-libéralisme.
Avec l’élection du gouvernement Charest en 2003, on assiste à plusieurs tentatives de refonte de l’État. Sous le prétexte de l’alourdissement des déficits et de la dette publique, on nous a servi la réingénierie de l’État, on a maltraité les employés de l’État entrainant par le fait même une perte d’expertise dans les ministères, on a fait appel à la sous-traitance des services publics (notamment au Ministère des transports du Québec avec les résultats qu’on connaît!), on a exploré les partenariats public-privé (PPP) dont celui du CHUM, on a  permis, de façon bien hypocrite d’ailleurs, la privatisation en douce d’une partie du système de santé, on a introduit la tarification basée sur le principe de l’utilisateur-payeur, etc…
Jean Charest et Paul Desmarais jr.
À partir des années 2000, l’État a cessé  toute concertation,  préférant gérer les affaires avec des entrepreneurs-amis  et des corporations «intéressées» sans trop se préoccuper de consulter les autres corps intermédiaires. Les nombreux exemples de connivence entre le gouvernement et les amis-affairistes démontrent bien cette situation. Pour en nommer quelques-uns :





ü  Des ex-ministres ou des ex-apparatchiks des partis politiques qui se retrouvent dans des emplois prestigieux de consultants ou de lobbyistes;
ü  Les accointances entre les hommes politiques et le monde des affaires lors de rencontres privées;
ü   Le financement «occultes» des partis politiques…
ü  Tout cela créant un climat très glauque de corruption.
Sous le gouvernement Charest,
les manifestations ont été nombreuses.
Procédant ainsi, le gouvernement Charest a semé la grogne dans une grande partie de la population de sorte que la contestation a pris beaucoup d’ampleur : groupes de citoyens, mouvement écologiste, syndicats, groupes communautaires, mouvement étudiant,… Bref, ces dernières années au Québec, on a senti un manque flagrant d’écoute de la part du gouvernement, un manque d’écoute qui a conduit directement à la contestation. La rue s’est fait beaucoup entendre! Les exemples sont nombreux depuis que le gouvernement Charest est au pouvoir :
ü  La lutte contre la centrale du Suroît;
ü  la privatisation du Parc du Mont-Orford;
ü  La lutte contre les terminaux méthaniers de Cacouna et de Lévis (Rabaska);
ü  La lutte contre le développement du nouveau casino de Montréal dans le quartier de Pointe Saint-Charles;
ü  La lutte contre le développement sauvage des gaz de schiste;
ü  Le mécontentement grandissant contre le développement du  Plan nord;
ü  La révolte contre la hausse des droits de scolarité.


«We are the 99%!», le super slogan
du mouvement «Occupy»
Sous les prétextes du développement économique et du contrôle de la dette publique, le gouvernement s’est coupé d’une grande partie de la société civile de plus en plus mécontente (99%). Voilà pourquoi la rue s’est fait entendre si souvent.




Voilà pourquoi il est grand temps que l’État redéfinisse les rapports sociaux entre le 1% des possédants et les 99 autres. Nous sommes prêts pour une quatrième phase dans le développement du modèle québécois de régulation, celle de l’État-gestionnaire de la richesse collective, gardien du bien commun. Le jeu de la démocratie nous permet de croire que c’est possible. Pour l’instant, cependant, il n’y a aucun véhicule politique susceptible de canaliser la grogne populaire. À quand un New Deal? Faudra-t-il attendre que tout s'écroule en Europe et aux États-Unis avant d'agir?
Michel Huot,sociologie, CBA

On a découvert un nouveau Michelange!

Aucune alliance possible entre la droite et la gauche...

lundi 28 mai 2012

Une analyse du conflit étudiant; droite contre gauche

Il y a actuellement sur la planète un éveil des consciences citoyennes qui se manifeste par des contestations des pouvoirs institutionnels. Pour en nommer quelques-uns : le printemps arabe (Tunisie, Égypte, …), le mouvement « Occupy »  avec leur fameux slogan 1% contre les 99% tenu dans plusieurs villes en Occident, les grèves étudiants (Chili, Angleterre…), les protestations importantes en Espagne, en Grèce (évidemment), les émeutes au Royaume-Uni (dont celle de Tottenham), etc…
Dans la plupart de ces conflits, on remarque une certaine lutte idéologique. En effet, il faut bien admettre qu’actuellement, le néo-libéralisme est contesté avec vigueur.  Les manifestants sont-ils capables d’articuler un discours cohérent contre le néo-libéralisme ? Ont-ils des solutions claires et définis à proposer comme alternative à cette idéologie qui dominent depuis une trentaine d’années? Pour la plupart d’entre eux, non.

Le mouvement étudiant au Québec s’inscrit dans ce contexte élargi. Dès le départ, bien que strictement centré sur la hausse des droits de scolarité, la contestation couvrait aussi une position idéologique anti-néo-libéralisme. Dès le départ, les deux camps se sont positionnés :  à gauche pour les étudiants, à droite pour le gouvernement Charest - pour reprendre la division classique des idéologies. Rapidement, ils se sont radicalisés en campant sur leur position. Malheureusement, avec  les jours qui passent, la sortie de crise devient de plus en plus difficile.
À gauche, les étudiants au carré rouge ont sorti des arguments solides. Jetons-y un coup d’œil. Ils veulent un gel des droits de scolarité (même la gratuité scolaire pour le Classe) parce que :
 

Représentants étudiants
1)      L’éducation supérieure est un «bien commun». Elle doit demeurer accessible à tous.
2)      Puisqu’il s’agit d’un bien commun, l’éducation est un droit humain fondamental.
3)      A contrario, l’éducation n’est pas une marchandise à vendre sur un marché de consommateurs.
4)      Les universités sont mal gérées car les ressources financières sont  mal réparties.


À droite, le gouvernement Charest a aussi développé un argumentaire bien ficelé :
Un gouvernement néo-libéral
1) Selon un «consensus social», les universités sont sous-financées depuis plusieurs années.
2) Or, les étudiants payent les droits de scolarité les moins élevés au Canada.
3) Donc, les étudiants doivent faire leur «juste part» et contribuer davantage au financement universitaire.
4) Nos universités doivent être de classe mondiale et compétitionner avec les meilleures.
Les deux camps ont vertement critiqué l’argumentaire adverse. À gauche, on a remis en question le consensus social sur le sous-financement. Il n’y aurait pas tant que ça de sous-financement mais de mal financement des services universitaires. Bien qu’étant les moins élevés au Canada, les droits de scolarité au Québec demeurent parmi les plus élevés au monde. La «juste part» est-elle faite par les corporations minières, les 1%? Les universités n’ont pas à compétitionner ? Elles offrent un service public à sa population. Elles doivent uniquement se concentrer à offrir le meilleur service possible aux étudiants.
À droite, on a aussi fait sa cavale. Elle a porté essentiellement sur l’accessibilité aux études sup. Je dirais que le gouvernement, avec son offre du 27 avril[1], a fait un effort pour se rapprocher de la position idéologique des étudiants au carré rouge – notamment en ce qui a trait à l’accessibilité aux études sup. Perso., j’ai bien cru que ça passerait! Mais non. Après 22 heures de négociation, l’offre du 5 mai[2] a été signée par toutes les parties.  Dans cette offre, la création d’un Conseil provisoire des universités répondait à l’argumentaire des étudiants qui critiquaient la gestion universitaire. L’offre a été rejetée.
Le choc idéologique entre la gauche et la droite a franchi une étape de plus avec l’adoption de la Loi 78 le 18 mai 2012[3]. Avec cette loi, l’État venait encadrer (un petit peu mais pas tant que cela !) la liberté de manifestation des citoyens québécois. Avec cette loi, l’État a choisi la voie autoritaire. La voie de la négociation devient difficile et la contestation ira en croissant !
Lorsqu’on pense en termes néo-libéraux, la position de l’État se défend ! L’individu a des droits et il faut les préserver. D’ailleurs, la loi 78  se nomme : Loi permettant aux étudiants de recevoir l’enseignement dispensé par les établissements de niveau postsecondaire qu'ils fréquentent. Intéressant ! Bien qu’il y ait grève étudiante, les étudiants qui veulent assister à leurs cours y ont droit. Les droits individuels ont préséance sur les droits collectifs. D’ailleurs, avant l’adoption de la Loi 78, une pluie d’injonctions s’était abattue sur le Québec pour faire prévaloir les droits individuels. D’ailleurs, depuis le début du conflit étudiant, le gouvernement n’emploie pas le terme de «grève» mais bien le «boycott» pour nommer le conflit, contestant par le fait même la légitimité des associations étudiantes et leurs fédérations. Le choix des termes n’est pas innocent ! Et dans une perspective néo-libérale, ça se tient.
L’État avait bien essayé de briser le mouvement collectif avant de voter la Loi 78 :
·         En ignorant systématiquement la demande des étudiants de geler les droits de scolarité. On peut parler de tout sauf de la question de fond !
·         En tentant d’isoler la Classe, fédération étudiante jugée trop à gauche. Diviser pour régner, tactique bien illustrée dans le Prince de Machiavel.
·         En refusant de négocier avec  les associations étudiantes qui ne dénoncent pas la violence, une question de principe. En tentant ainsi d’associer les étudiants aux casseurs, l’État laisse d’abord pourrir le conflit. gagne du temps et espère que le mouvement étudiant sera «délégitimé».
·         En laissant entendre que les jeunes sont gâtés avec leur IPhone et que payer  50 cents par jour, c’est tout simplement facile à gober ! En «infantilisant» ici les étudiants, on cherche à leur enlever toute crédibilité. D’ailleurs, les étudiants ont aussi joué le jeu en traitant de «mononcle» le gouvernement Charest.
Depuis l’adoption de la Loi 78, la suspension des cours a par le fait même suspendu la grève! Le conflit sur les droits de scolarité est parti ailleurs.  Il est devenu social si bien que la critique des gouvernements est devenue encore plus acerbe. Schématiquement, on assiste actuellement à un conflit classique droite-gauche. Dans les discours, dans la foule des manifestants, on dénonce les positions et les actions gouvernementales motivées par le néo-libéralisme. On dénonce carrément les actions de Charest et de Harper : l'achat des F-35, la hausse du seuil de la retraite à 67 ans, les mises à pied au fédéral, la modification du programme de l’Assurance-emploi, le conflit chez Air Canada et la menace d’une loi spéciale, la fermeture chez Aveos, la taxe santé, le plan nord, les gaz de schiste, la corruption dans la construction, le financement mafieux des partis politiques, l’impression que l’État «couche» toujours avec les 1%.

Les principes de «l’utilisateur-payeur» et du «privé meilleur que le public» ne passent plus auprès des manifestants. Et Jean Charest est devenu le symbole de cette approche. S’il entendait ce que les manifestants disent de lui!!!  
En ce moment, à la veille de la reprise des négociations, le climat est orageux! Le mouvement est en train de faire boule de neige. Le gouvernement Charest est-il en train d’échapper le ballon? A-t-il toujours les deux mains sur le volant? Les positions et les actions de la droite ont-ils toujours la cote?

Michel Huot, sociologie, CBA


[1] « L'offre du gouvernement du Québec aux étudiants » In Le Huffington Post Québec, En ligne. http://quebec.huffingtonpost.ca/2012/04/27/offre-charest-etudiants_n_1459134.htm. Page consulté le 28 mai 2012.
[2] « Entente concernant le Conseil provisoire des universités ». En ligne.  http://www.droitsdescolarite.com/data/docs/Entente_Etudiante_2012-05-05.pdf, Page consulté le 5 mai 2012.
[3] Assemblée Nationale, «  Projet de loi n°78 : Loi permettant aux étudiants de recevoir l’enseignement dispensé par les établissements de niveau postsecondaire qu'ils fréquentent».  En ligne.  http://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-78-39-2.htm. Page consulté le 18 mai 2012.

lundi 21 mai 2012

Quelques mises en garde - à propos des médias

Bonjour

Je viens de lire avec intérêt votre billet.

La grève des étudiants contre la hausse des frais de scolarité;
Dis-moi quel média tu consultes et je te dirai si tu es rouge ou vert!
http://rshcq.blogspot.ca/2012/05/lagreve-des-etudiants-contre-la-hausse.html

 Je suis heureux que vous vous intéressiez au phénomène médiatique.  Toutefois, je me permets quelques mises en garde.

1- Ne mélangez pas contenu journalistique et commentaires.
Chaque média compte des commentateurs qui sont libres de leurs orientations et peuvent avoir un parti pris dans la mesure où ils ont la capacité de le défendre.  Le reporter lui doit simplement rapporter la nouvelle de la façon la plus objective et équilibrée qu’il est possible de le faire.  Comme vous vous en doutez ça donne des contenus très différents.

2- Ne mélangez pas commentateur et éditorialisteComme je viens de le mentionner, le commentateur ou chroniqueur doit prendre position et la défendre, même si elle est à l’opposé de celle du journal.  L’éditorialiste lui représente la vision et la position du journal et la défend.  D’un côté, vous pouvez donc avoir Rima Elkouri et Michèle Ouimet et d’un autre André Pratte.  La dualité des opinions permet  une richesse des points de vue.

3- Média et journalisteDonc, la position éditoriale n’a rien à voir avec celle d’un reporter ou d’un chroniqueur.

4- Orientation des médiasPour analyser le contenu de chaque média, je peux vous confirmer qu’aucun média n’a une position unilatérale.  Même si on pouvait être tenté de la croire, de façon très rationnelle je pourrais prendre chacun des médias traditionnels et vous démontrer sans mal que chaque média compte des contre-partis.  Quand un débat devient aussi émotif, c’est normal de croire le contraire.  Dans le contexte actuel, on manque beaucoup de recul.  D’ailleurs, j’avoue qu’il temps que certains lancent un appel au calme.  De plus, je vous confie confidentiellement que depuis 2 semaines, nous remarquons qu’un mot est chaque jour utilisé un peu plus dans les médias sociaux et surtout à la radio hors-Montréal. Il s’agit du mot “armée”.  La masse des médias ne le voit pas encore mais environ tous les 3 jours, le mot armée associé au conflit étudiant voit son utilisation doubler.

5- Crédibilité des médiasLa crédibilité des médias traditionnels est attaquée.  En relations publiques, les centrales syndicales sont les organisations qui utilisent le plus souvent cette stratégie.  Au cours des derniers mois, quand bon nombre de reportages ont lié des “organisations” syndicales à la corruption, plusieurs journalistes ont fait l’objet de menace.  Au lieu de combattre les faits avancés, des leaders syndicaux se sont attaqués aux messagers.  Étonnamment, si bon nombre de citoyens remettent en question la crédibilité des médias traditionnels, ils n’hésitent pas à accorder de la crédibilité à la folle rumeur lancée sur Twitter voulant que Gabriel Nadeau-Dubois soit le fils de Pascal Nadeau (fille de Pierre Nadeau).

Même si les médias traditionnels sont constitués d’égos et parfois de raccourcis agaçants ils jouent un rôle fort positif dans l’ensemble des enjeux de société.  En fait, bien que nos médias soient à mon avis trop régionaux et pas assez ouvert au reste du monde, je ne vois pas vraiment de grandes différences entre nos médias et ceux qu’on peut trouver un peu partout.

J’ajouterais que si CUTV avait avantage à s’ouvrir aux différents angles et idées en se trouvant aux côtés des médias traditionnels, elle ajoute au moins une richesse au débat en donnant de la diversité.

Voilà pour tout de suite.

Bonne journée !

Jean-François Dumas
Président
Influence communication

dimanche 20 mai 2012

La grève des étudiants contre la hausse des frais de scolarité;
Dis-moi quel média tu consultes et je te dirai si tu es rouge ou vert!
La grève a fait couler beaucoup d’encre – énormément d’encre! En fait, selon Influence Communication, elle est la nouvelle la plus importante depuis février :
La couverture du conflit étudiant dans les médias traditionnels :
Date
Poids médias[1]
Rang
14-20 février
0,53
5
21-27 février
2,16
3
28 au 5 mars
1,43
1
6 au 12  mars
1,73
1
13 - 19 mars
1,85
1
20 - 26 mars
2,21
1
27 au 2 avril
2,16
3
3 au 9 avril
2,03
1
10 au 16 avril
3,21
1
17 au 23 avril
4,36
1
24 au 30 avril
6,25
1
1 au 7 mai
6,68
1
8 au 14 mai
8.24
1
                                                Source : Influence Communication
Dans les médias traditionnels (journaux, magazines, télévision, radio), la couverture du conflit étudiant n’a donc cessé d’enfler! Bien que le conflit ait été amplement couvert par les médias trad., peut-on parler d’une couverture de qualité? On sait que la quantité ne garantit pas la qualité! Influence communication a produit un graphique intéressant sur le traitement de l’information :
Traitement médiatique du conflit étudiant :
                   Source : Influence Communication
On constate dès le premier coup d’œil que les arguments des parties ont graduellement cédé du terrain devant la médiatisation des actes de violence. Comme quoi un conflit qui perdure et pourrit se radicalise! Peut-on affirmer que ce conflit est traité par les médias traditionnels avec toute l’objectivité journaliste qu’il mérite? Je suis loin d’être convaincu!
Plusieurs éditorialistes et chroniqueurs ont pris carrément parti pour le gouvernement. Richard Martineau au Journal de Montréal, Gilbert Lavoie au Soleil, André Pratte et Alain Dubuc à la Presse ont beaucoup écrit contre la position des étudiants. Par contre, à la Presse, d’autres journalistes ont été plus conciliants avec la position des étudiants : Lagacé, Elkouri..
 Il y a aussi des sympathisants au Devoir (Josée Boileau), au journal Voir (Josée Legault). Le blogue de Jean-François Lisée (http://www2.lactualite.com/jean-francois-lisee/) avait aussi une saveur pro-étudiante.
À la télévision, autre média populaire s’il en est, TVA et V ont semblé pencher vers la position du gouvernement. Quant à Radio-Canada (et son canal de nouvelles en continu RDI), plusieurs téléspectateurs ont noté un penchant vers la position des étudiants. D’ailleurs, même l’ombudsman de Radio-Canada a dû traiter quelques plaintes concernant le supposé «parti pris» des journalistes impliqués. (http://blogues.radio-canada.ca/ombudsman/archives/1616)
Évidemment, l’analyse de contenu de la couverture médiatique du conflit étudiant reste à faire. Il est très prématuré  de tirer des conclusions définitives. Mais on peut déjà poser une  hypothèse de recherche :
1)      Les journaux et la télévision ne sont pas neutres. Ils tiennent une  position idéologique.
2)      Le lectorat et l’auditoire de ces médias s’aligne sur la même position idéologique.
Mais il faut se pencher sur un autre phénomène tout à fait fascinant lorsqu’on s’intéresse à ce conflit : l’utilisation des médias sociaux. Les blogues, Facebook et surtout Twitter ont été des vecteurs de mobilisation extraordinaire pour les étudiants. Il faudra absolument analyser minutieusement l’utilisation des médias sociaux. D’ores déjà, on peut affirmer qu’il y a une fracture générationnelle importante quant à l’utilisation de ces médias. La génération C (les moins de 30 ans) gravite massivement dans la sphère des médias sociaux.
Depuis quelques années, personnellement, j’ai remarqué une nette migration des étudiants vers les médias sociaux. Nos jeunes ne regardent à peu près plus la télévision, n’écoutent plus la radio et ne lisent pratiquement plus la presse écrite. À toutes les années, dans le cadre du cours de Méthodes quantitatives, j’administre un petit questionnaire portant sur plusieurs dimensions de leur vie quotidienne. Je leur demande où ils s’informent. Dans une proportion écrasante, ils me parlent de Facebook, Twitter, des blogues. Ils sont branchés et ont définitivement tourné le dos aux médias traditionnels. D’ailleurs, depuis une dizaine de jours, plusieurs journalistes des médias traditionnels ont senti la grogne des manifestants. Quelques-uns ont même été violentés.[2] Bien que tout à fait inacceptables et non cautionnables, ces actes peuvent s’expliquer ainsi : les manifestants jugent que les médias traditionnels ont pris parti contre le conflit étudiant. Ils jugent que ce sont des appareils idéologiques au service du pouvoir politique.
Or, pour ceux qui ont suivi le conflit sur les médias sociaux, vous savez que la position idéologique dominante – pour ne pas dire écrasante, c’est, au minimum le gel des droits de scolarité, sinon même la gratuité! Juste par curiosité (si ce n’est déjà fait), allez visiter CUTV (http://cutvmontreal.ca/), la télévision communautaire des étudiants en communication de l’université Concordia! Vous allez voir des images là que vous n’avez jamais vues dans les médias traditionnels! Les manifestations étudiantes sont couvertes sous un angle tout à fait différent. Et le travail des policiers n’apparaît pas sous son meilleur jour… Sur Twitter, il faut absolument consulter : #assnat, #ggi, #manifencours.
Donc, nous vivons ici un conflit générationnel important à travers la «grève» étudiante. D’une part, les plus de 30 ans qui continuent de consulter les médias traditionnels; d’autre part, la génération C qui s’alimente dorénavant aux médias sociaux.
L’analyse de contenu de la couverture médiatique du conflit étudiant devra de façon incontournable inclure les médias sociaux dans son corpus. Mais on peut déjà poser une  hypothèse de recherche :
1)      Les médias sociaux ne sont pas neutres. Ils tiennent une  position idéologique.
2)      Les utilisateurs de ces médias ont moins de trente ans.
Déjà, en consultant les quelques sondages d’opinion qui ont été réalisés sur le conflit, on peut voir apparaître cette ligne de démarcation générationnelle. Ainsi, dans le dernier sondage réalisé par Léger marketing le 10 mai dernier,  on a noté le niveau d’appui au mouvement étudiant par génération. Ainsi, chez les 18-35 ans, on appuie majoritairement la position des étudiants (51% pour, 44% contre). C’est le contraire chez les plus de 35 ans (61% contre, 29% pour).[3]
D’où ma conclusion : Si tu regardes TVA ou V, lis le Journal de Montréal ou La Presse,  tu es vert. Si tu t’informes sur les médias sociaux, tu es rouge! Si tu lis Le Devoir et regardes Radio-Canada et RDI, t’es plutôt rouge.
Michel Huot, sociologie, CBA


[1] Note : Le poids médias établit le pourcentage qu’a occupé une nouvelle, un événement ou même une personne par rapport au volume total de nouvelles au cours de la même période.
[2] Voir notamment cet article du Devoir qui fait une analyse pertinente du phénomène des agressions sur les journalistes : http://www.ledevoir.com/societe/medias/350262/le-choc-des-perspectives
[3]Léger Marketing, «Sortie de crise», En ligne : http://www.legermarketing.com/admin/upload/publi_pdf/R2012-05-15-MAI-021-.pdf. Consulté le 16 mai 2012.