Je voudrais élargir la réflexion à
l’égard des trois cours transdisciplinaires en sciences humaines, MQ, IPMSH et
DIASH[1].
Le 30 janvier est paru un article sur IPMSH et DIASH. Plusieurs commentaires sont parus à la suite
de cet article.
Cette réflexion que j’apporte exprime
mon opinion basée sur une expérience à enseigner et à appliquer, de 20 ans dans
le cours de MQ et de plus de 12 ans pour les deux autres cours, IPMSH et DIASH.
Ce sont des cours que j’enseigne régulièrement et que je considère essentiel
dans le programme. Chaque cours a son utilité propre. L’application du contenu
de chaque cours doit être mise au premier plan dans l’enseignement et
l’apprentissage de ce contenu.
Pour situer le lecteur[2],
au Cégep de Sherbrooke, le cours de MQ est offert en première année (à
l’automne pour une moitié des étudiants et à l’hiver, pour l’autre moitié de la
cohorte annuelle), le cours d’IPMSH se donne à la troisième session et enfin,
le cours de DIASH, à la dernière session. Ce cours est également le cours
porteur de l’Épreuve-synthèse de programme.
C’est la séquence que nous retrouvons dans le curriculum du programme à
ce cégep.
Cours de MQ
Débutons d’abord par le cours de MQ. Ce
cours existe depuis l’automne 1991 au Cégep de Sherbrooke. C’est un cours
d’application de méthodes quantitatives reliées à des contextes de sciences
humaines. Ce cours est nécessaire et
utile pour tout étudiant en sciences humaines.
À tous les jours, nous sommes confrontés à des données chiffrées sous
diverses formes dans les médias (version papier ou électronique). Il est important de comprendre la
signification de ces données pour connaître leurs implications dans nos vies et
parfois, dans certaines décisions gouvernementales ou autres, être capable de
faire preuve de jugement critique.
L’application est essentielle dans ce
cours mais j’irai plus loin dans ma réflexion, dans chaque cours du programme à
toutes les fois où des données chiffrées sont utilisées dans les exemples
apportés par les professeurs des disciplines (géographie, sociologie,
économique, politique, etc.). Si
l’enseignant disciplinaire n’utilise jamais de données chiffrées, le cours de
MQ reste pour l’élève un cours n’ayant aucune utilité, complètement à part du
programme. Je trouve cela très
dommage. Pour les professeurs qui
enseignent ce cours, il est facile de mettre en application les notions
présentées.
À l’automne 1991, j’ai eu la chance de
donner le cours et j’ai mis mes étudiants en contexte d’application : jumelage
avec un professeur de géographie pour l’analyse et la création d’un indice
d’aménagement. Par la suite, plusieurs autres applications ont eu lieu à divers
niveaux : implication locale (Service d’orientation, Service du
socioculturel, Comité Environnement) ou régionale (arrondissement 05 de la Ville
de Sherbrooke, Université de Sherbrooke, etc.).
Il ya plusieurs organismes
communautaires qui n’ont pas les moyens financiers d’engager un responsable
d’enquête pour sonder les besoins de leur clientèle. Je considère que ce cours
peut servir à combler ce besoin. Les
étudiants n’ont pas à établir nécessairement un questionnaire ou une
problématique comme dans le cours d’IPMSH.
D’ailleurs, l’organisme connaît bien ses problématiques et peut déjà
établir ses besoins en termes de questionnaires. Pour un organisme, ce qui peut
être plus long concerne la saisie, le traitement et l’analyse statistique. Ces étapes correspondent à l’application des
éléments de compétence 2 et 3 de ce cours.
Il peut arriver que la phase collecte de données paraisse longue mais,
si l’organisme dispose d’une équipe de bénévoles, cette étape peut se réaliser
grâce à leurs efforts, tout dépendant de la technique d’échantillonnage
utilisée.
Cours d’IPMSH
Passons au cours d’IPMSH. Une des visées
du cours est de faire le processus complet d’une recherche, de l’idée du thème
de recherche jusqu’à sa diffusion.
Encore, ici, les aspects pratiques doivent prévaloir. Il faut garder en
tête que ce cours se veut une initiation pratique aux méthodes dans les sciences humaines. Le cours ne vise pas à
faire de l’étudiant un spécialiste d’un domaine précis des sciences humaines
mais plutôt permettre un survol des différentes techniques qui existent. Selon
ce qui revient le plus souvent dans les volumes d’IPMSH, ces techniques sont
l’observation, l’entrevue, le questionnaire, l’analyse de contenu, l’analyse
statistique (ou de séries chiffrées) et l’expérimentation. Idéalement, l’étudiant devrait les mettre en
application non pas obligatoirement dans une recherche complète mais simplement
ce que je nomme en faire une application partielle. Par exemple, mettre l’étudiant en situation
d’observation participante. Je
m’explique. Je fais cette activité avec
des gens de la francisation, les étudiants vont participer aux activités du
groupe de francisation sans connaître à l’avance les activités prévues. Je les
mets dans un contexte où chacun joue le rôle d’un anthropologue. L’étudiant participe à ce qui se passe et
ensuite au retour, il note ses observations par rapport à certaines
dimensions. Par la suite, je fais suivre
cette activité par l’application d’une analyse de contenu des observations
notées.
À l’université, lorsque l’étudiant sera
dans son programme terminal, il devra suivre un cours de statistiques, de
méthodes quantitatives et/ou de méthodologie dont le contenu, les méthodes et
techniques seront directement en lien avec sa spécialisation. Ce n’est pas la
visée du cours d’IPMSH.
Cours de DIASH
Pour le cours de DIASH, l’image qui me
vient à l’esprit est l’équivalent d’un étudiant en techniques qui a un stage. L’étudiant a à démontrer qu’il possède les
compétences inhérentes à sa technique.
Dans les programmes préuniversitaires, la finalité est la préparation à
l’université. L’étudiant doit donc démontrer qu’il possède les compétences
(connaissances, habiletés et attitudes) pour réussir des études
universitaires. Mais quelles sont ces
compétences me direz-vous ? C’est un autre débat fort intéressant dont je
soumets quelques idées à la fin de ce texte d’opinion.
Selon moi, le cours de DIASH doit se
faire seul pour le projet d’intégration. De plus, j’affirme que ce cours
devrait avoir comme résultat la lettre R (pour réussite) ou E (pour échec) et
non pas une note. Un étudiant qui
obtient 60 % en DIASH n’a pas atteint les compétences nécessaires pour l’université. Il lui manque des éléments de compétences
essentiels, au moins les 2/5 dans ce cas-ci. C’est comme un chirurgien qui
opère un patient. Il doit couper pour ouvrir, faire l’opération et recoudre. Pour être compétent, il doit maîtriser les
trois actes professionnels. Sinon, il manque quelque chose à sa fonction.
Toujours concernant le cours de DIASH, à
mon collège, il y a deux types de projets possibles : un projet de
recherche empirique ou un projet appliqué.
Selon le plan cadre, pour que le projet d’intégration soit accepté,
l’étudiant doit effectuer des liens entre au moins trois disciplines du
programme et démontrer la pertinence du projet en fonction de son orientation
ou encore de l’utilité sociale de ce dernier. Le projet de recherche
empirique consiste à la production d’un rapport écrit. Des étudiants nomment parfois ce cours IPMSH
2. Pour les projets appliqués,
l’étudiant doit aller dans un milieu de pratique, aller rencontrer un
spécialiste du domaine et bien d’autres choses. Souvent un projet appliqué va
permettre à l’étudiant de confirmer ou d’infirmer son choix vocationnel. Il n’en fait pas un spécialiste mais avec le
support (obligatoire) d’une personne-ressource (un spécialiste reconnu dans le
domaine), le projet appliqué lui permet de baigner dans son futur milieu
professionnel.
Voici deux exemples de projets appliqués
qui ont eu lieu à l’automne 2011, session où j’avais trois groupes en
DIASH. Prenons le cas d’une étudiante
qui se dirigeait en orthopédagogie.
L’étudiante a conçu un guide pratique s’adressant aux parents d’enfants
nécessitant les services d’un orthopédagogue.
Elle a réalisé son guide et l’a fait évaluer par une orthopédagogue qui travaille
à l’enseignement primaire et donne de la formation aux parents. Ce projet a permis de confirmer l’orientation
de cette étudiante. Un autre cas est
celui d’une étudiante qui voulait poursuivre des études universitaires en orientation. Elle a produit un jeu de mémoire ayant pour
but de faire prendre conscience aux jeunes filles qu’il existe plusieurs
métiers qui s’offrent à elles et qui sont intéressants. Elle a présenté son jeu devant trois classes
de filles de secondaire V, elle a recueilli leurs opinions. Au préalable, elle avait soumis son jeu de
mémoire à la conseillère d’orientation de l’école en question. À la fin du projet, cette étudiante a modifié
son choix d’orientation, elle a décidé de poursuivre des études dans le domaine
des relations de travail plutôt que comme conseillère d’orientation.
À présent, je reviens aux compétences
utiles pour l’université. Selon moi, ces compétences s’expriment surtout en
termes d’habiletés et d’attitudes. La
liste que je vous présente est celle issue du plan cadre de DIASH 2002 au Cégep
de Sherbrooke. Les habiletés et
attitudes sont : la recherche d’information, l’utilisation des outils de
communication par internet, l’utilisation d’un logiciel de présentation, la capacité
d’analyse et de synthèse, la capacité de formuler un raisonnement cohérent, la
capacité d’appliquer des savoirs à l’analyse de situations, la gestion du temps,
la pensée et le jugement critique, la capacité de réfléchir sur sa pratique,
l’autonomie, la créativité, le sens de l’éthique, la capacité à recevoir la
critique, la maîtrise du français écrit, la capacité d’expression orale en
français et la capacité à comprendre un texte en anglais.
Cette liste ne prétend pas être exhaustive. Aucune
mention n’est faite des connaissances (savoirs) utiles pour l’université. Ces connaissances acquises varient d’un
profil à l’autre dans le programme de sciences humaines et celles attendues par
les programmes universitaires vont dans le même sens.
Pour terminer, je considère que le cours
de DIASH devrait nous permettre de mesurer le degré d’atteinte (sur une échelle
qualitative) ou non de chaque élément précédent, qu’il soit rattaché au bilan,
au transfert ou à la métacognition.
Ginette Bousquet, M.Sc.
Professeure de géographie et de
méthodologie
Cégep de Sherbrooke
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