mercredi 14 décembre 2011

Compléments sur la problématique de la langue au Québec

Pour tous ceux qui désirent réfléchir sur la problématique de la langue au Québec, il faut absolument ajouter au dossier les deux documents suivants.
Le billet de Jérôme Lussier:

Doléances pour un Québec dépassé
 
et la réplique de Jean-François Lisée: 
Félicitations pour un Québec décomplexé

Lisez les commentaires! Très intéressant!

***
Il ne faut pas avoir la tête dans le sable. Les jeunes sont totalement séduit par l'anglais comme véhicule culturel. Même en Beauce, lorsque je discute avec mes étudiants, j'ai souvent des commentaires qui s'articulent comme suit:
  1. Regarder The Price is right au canal V, c'est tellement «poche»! Vaut mieux voir la version originale en américain!
  2. Le cinéma américain bouffe le cinéma québécois, pâle copie du cinéma américain.
  3. La musique américaine est tellement meilleure que la musique québécoise.
  4. Les magazines anglo-saxons présentent les tendances - les magazines québécois sont en retard!
  5. Internet! WÔW! surtout en anglais!
L'attrait de l'anglais ne fait aucun doute. Et je comprends parfaitement que l'anglais est un véhicule extraordinaire pour accéder à la grande production culturelle américaine. Malheureusement, je trouve assez désolant d'associer la post-modernité à la langue anglaise - comme si l'univers post-moderne ne pouvait se vivre qu'en anglais. Comme si la mondialisation culturelle ne se faisait qu'en anglais.
Comme enseignant, ne serait-il pas opportun de sensibiliser davantage nos étudiants à la richesse de la production culturelle québécoise? Par exemple, j'ai réalisé que peu d'étudiants avaient vu Incendies! Peu d'étudiants connaissaient Riopelle. Même Gaston Miron n'est pas sur leur radar!  Sans dénier leur désir de participer à la grande mouvance post-moderne anglo-saxonne, n'avons-nous pas la responsabilité de leur montrer notre production culturelle? Je sens souvent dans le discours de plusieurs jeunes un jugement de valeur négatif de leur propre culture. Je les trouve un peu complexé... peut-être parce qu'ils connaissent peu notre production culturelle de qualité.
Michel Huot, sociologie, Beauce-Appalaches

lundi 12 décembre 2011

Les sciences humaines doivent prendre la place qui leur revient.

J’ai parfois l’impression qu'on peut s’improviser « spécialiste des sciences humaines » dans les cégeps. Par exemple,
  • Des enseignants en soins infirmiers qui enseignent les cours de communication, spécialité attribuée généralement à la psychologie;
  • Des enseignants en anglais qui décident de donner des cours d’histoire américaine en anglais, spécialité généralement attribuée à l’histoire;
  • Des spécialistes des mathématiques qui donnent le cours de Méthodes quantitatives;
  • Des enseignants spécialistes du français donnant des cours de sociologie des médias dans des programmes d’Arts et lettres;
  • Des enseignants en éducation spécialisée qui donnent des cours de psychologie.
Assistons-nous depuis quelques années à un glissement vers le déni d’expertise des sciences humaines? Si tel est le cas, laisser aller la tendance sans protester signifie perdre à moyen terme des « cours de service » dans les programmes techniques. Au-delà du discours sur les « jobs », discours bien anecdotique quant à nous, c’est le discours de l’expertise qu’il faut privilégier. À l’enseignement supérieur, c’est exactement ce qu’on valorise : l'expertise!

Les sciences humaines ont développé des expertises qui leur sont propres : des méthodes riches et variées, des savoirs spécifiques fondés, un corpus de connaissances basées sur des recherches objectives, des visions particulières de la vie en société. Il faut le faire reconnaître. Ce n'est pas tout le monde qui est habilité à manipuler cette riche production. Si on laisse à d'autres le soin de jouer avec ces compétences, on « secondarise » le collégial, censé appartenir à l’enseignement supérieur. C'est aussi admettre que nos disciplines ont peu de valeurs et que n'importe qui peut les enseigner!

Donc, il faut s’assurer que les professeurs qui enseignent du contenu propre aux sciences humaines soient « patentés ». Ont-ils les compétences nécessaires? Ont-ils un diplôme qui démontre leur expertise? Si oui, tant mieux. Sinon, il faut réagir pour corriger la situation. Mettre de la pression sur les directions des études afin qu’elles reconnaissent que les sciences humaines génèrent des expertises exclusives. Tout simplement parce que les sciences humaines doivent prendre la place qui leur revient.
***
Il faut documenter ce phénomène! Y a-t-il réellement déni d'expertise des sciences humaines dans les collèges? Présentement, la réponse n'est pas claire.

Comment est-ce à Vieux-Montréal, Dawson, Edouard-Montpetit, Granby, Sherbrooke? Comment est-ce en Outaouais, en Abitibi, à Chicoutimi, Sept-Îles, Rivière-du-Loup, Sainte-Foy, Limoilou, Lévis-Lauzon? Partout dans les collèges!
N’hésitez pas à nous faire part de votre expérience collège en nous laissant un commentaire au bas de ce billet ou en nous envoyant un courriel : rshcq@cegepba.qc.ca

Michel Huot,
sociologie,
Beauce-Appalaches

mardi 6 décembre 2011

Voilà pourquoi il faut abolir les sciences humaines au cégep!

Rythmé par les échanges vifs d’élèves regroupés pour procéder à un exercice, ce jour-là, le cours allait bon train. Soudain, du fond de la classe, un étudiant s’exaspère et tonne :
— Honnêtement, monsieur, je ne comprends plus rien! La revue de presse que nous avons faite ne cesse de répéter que nous n’avons pas le choix, qu’il faut renoncer à toute idéologie et être pragmatique; que l’État n’a plus d’argent et qu’il faut créer de la richesse, être plus compétitif et plus productif; qu’au nom de la classe moyenne, il faut sortir du statu quo dans lequel nous enferment les syndicats; que nous sommes les plus taxés en Amérique du Nord, mais qu’il faut faire notre part en payant les services que nous utilisons…
— En effet, lui répondis-je. Qu’est-ce que tu ne comprends pas?
— Il doit bien y avoir quelqu’un quelque part qui dit n’importe quoi!
— Qu’est-ce que tu veux dire?
— En économie, on a vu que nous vivons dans un système capitaliste fondé sur la propriété privée et l’appât du gain et où tout le monde est en concurrence contre tout le monde. Comme une guerre qui n’arrête jamais.
— Et…?
— Et en philo, on a vu que ce système économique s’accompagnait d’une idéologie, le libéralisme, qui est la pensée dominante du monde occidental depuis deux siècles. Puis, en politique, que le libéralisme est une idéologie pour laquelle tout ce qui compte, c’est de mettre l’État au service des intérêts privés. J’imagine que c’est pour ça qu’on a baissé les impôts, qu’on veut augmenter les frais de scolarité, limiter la syndicalisation…
— Alors?
— Alors c’est bizarre, parce qu’en histoire, on a vu que sans les luttes mener par les syndicats et d’autres mouvements populaires, il n’y aurait pas de droits sociaux et économiques comme l’accès à l’éducation, aux soins de santé et toutes ces autres choses qui permettent l’existence d’une classe moyenne.  
— OK?
— Pendant ce temps-là, le prof de psycho a dit qu’il y a une forte pression à la performance partout dans la société, notamment dans les milieux de travail, que ça engendre du stress et que le stress, ce n’est pas bon pour les individus. En géo, on a vu que les problèmes écologiques provenaient de choix politiques et économiques et que là, la planète n’est plus capable. En éduc, on nous répète continuellement que la santé physique et mentale, c’est important, et je ne sais plus quel est l’auteur qu’on a lu en français qui disait que la « qualité des liens » valait mieux que la « quantité des biens »…
— Oui?
— On est obligé de vivre ça? En anthropo, on a appris que pendant des millénaires, les activités humaines n’étaient pas orientées vers la recherche constante du profit, qu’il y avait toute sorte de règles et de normes collectives pour maintenir la cohésion de la communauté et que la coopération a toujours été plus importante que la compétition.
— Tout cela est fort intéressant, jeune homme, mais pardonne-moi, je ne comprends toujours pas ce que tu ne comprends pas.
— Là, en socio, on parle d’effritement des liens, de société de consommation et d’hyperindividualisme, de croissance des inégalités sociales, des problèmes sociaux pis toutes ces affaires-là! Coudonc, est-ce que c’est moi ou bien les profs du Cégep font exprès pour enseigner le contraire de ce que l’on répète à la télé et dans les journaux?
— Qu’en penses-tu?
— Que c’est peut-être pour ça que certains veulent abolir les Cégeps!

Jean-François Fortier
Sociologie
Sherbrooke

lundi 5 décembre 2011

Le point sur le blogue du RSHCQ

Plus nous sommes réseautés,
plus nous sommes forts!
Cela fait maintenant environ deux mois que le RSHCQ a lancé son blogue. Depuis, nous avons réussi à obtenir les adresses électroniques des enseignantes et enseignants en sciences humaines de presque tous les cégeps du Québec! Un tour de force! Imaginez tout ce que nous pouvons désormais en faire : constituer une banque de renseignements sur toutes sortes de sujets; faire circuler des informations ou des idées; analyser, échanger ou débattre de thèmes qui nous préoccupent, organiser des consultations, revendiquer des ressources ou des changements pour notre programme…

Si vous souhaitez diffuser de l’information ou susciter des débats ou encore signaler une activité pertinente pour les sciences humaines, notre blogue peut être un excellent lieu pour ce faire! N’hésitez pas à nous soumettre des textes, s’ils respectent notre Nétiquette nous les publierons avec plaisir!  Ayez à l’esprit que le RSHCQ a notamment pour objectif de valoriser notre programme d’étude, d’en faire la promotion et de voir à son rayonnement… En travaillant de concert pour contribuer à la réalisation de ces objectifs, nous mettons en place une force tranquille prête à s’activer au moment opportun…
Quelques constats au sujet de notre blogue. D’abord, c’est Michel Huot, professeur de sociologie au Cégep Beauce-Appalaches, qui a rédigé la plupart des billets que l’on y trouve présentement. Ce sont des textes intéressants et de bonne qualité.  Un grand merci à Michel et souhaitons qu’il conserve encore longtemps cette belle énergie.  Cependant, pour ne pas user ou abuser de notre blogueur… votre contribution serait grandement appréciée. 

Autre constat : bien que le site reçoive de nombreuses visites, on trouve peu de commentaires et d’échanges suscités pas les différents billets à chaque semaine.  Nous sommes tous très occupés… Quelques mots pour compléter le point de vue proposé ou en faire une critique seraient grandement appréciés. Cela ne fait qu’enrichir la réflexion. Encore une fois, n’hésitez pas à nous proposer des textes de votre cru. 

Veuillez aussi comprendre que nous sommes en apprentissage.  Nous cherchons notre voie propre. Les billets présentés visent généralement à amener des réflexions en lien avec notre profession. Peut-être devrions-nous circonscrire notre ligne éditoriale à des objets qui concernent uniquement les cégeps et le programme que nous voulons valoriser? Or, il n’est pas facile de restreindre les questions à aborder puisque, en sciences humaines, la patinoire est immense!  Des préoccupations qui, de prime abord, apparaissent sans lien évident peuvent se transformer en matière à discussion dans nos cours… 

Le rythme des billets est assez important.  Nous visons à en publier un par semaine.  Si les collaborations s’accroissent, la cadence des publications augmentera inévitablement. Un envoi de courriel pour vous signaler les nouveautés ne sera probablement pas nécessaire à chaque fois. Bref, nous voulons être présents, actifs et stimuler la réflexion, mais pas devenir agaçants… Votre collaboration est souhaitée.  Aidez-nous à développer notre force… Nous avons tout à y gagner!   

Claire Denis
Sherbrooke