La
révision du programme de Sciences humaines suscite bien des questionnements
chez ses professeurs, notamment quant à la méthodologie et aux résultats de l’enquête
auprès des professeurs d’université. En janvier, Dominic Roy, du Cégep régional
de Lanaudière à Terrebonne, a fait part de ses réserves sur les orientations
souhaitées par les universités.
Maintenant,
c’est un groupe de professeurs du Cégep Édouard-Montpetit qui prend l’initiative
d’écrire au Ministère: le rapport des universités contient des lacunes
méthodologiques importantes et ses conclusions ne devraient pas déterminer la
direction à suivre pour conduire à la révision des Sciences humaines. N’hésitez
pas à déposer vos propres commentaires à la suite de ce texte. Ce texte est également paru dans Le Devoir, le 24 mars.
* * *
Le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MEES) travaille
à la révision du programme de Sciences humaines au collégial. Ce programme est
le plus fréquenté du réseau collégial. À titre d’exemple, au Cégep Édouard
Montpetit, nous accueillons plus de 2000 étudiants.es en Sciences humaines, ce
qui représente environ 30% de notre population étudiante totale.
La Direction
de l'enseignement collégial public et privé (DECPP) a été mandatée pour mener
ce projet à bien. Elle a commandé une étude dont les résultats ont été
présentés l’automne dernier dans un document intitulé Le profil attendu par les universités de la part des diplômés du programme d’études préuniversitaires Sciences humaines. Cette étude
présente les résultats d’un sondage réalisé auprès des départements de Sciences
humaines, sociales et d’administration des universités québécoises. Rédigé avec
l’objectif « d’établir le profil attendu par les universités de la part
des diplômés du programme » (p. 4), ce document servira notamment au
comité qui sera chargé d’examiner le programme actuel afin de faire des recommandations
pour le réviser. Nous désirons vous
faire part de certaines de nos réserves par rapport à ce document. Mis à
part le mépris apparent que cette étude semble démontrer à l'égard de notre
travail, nous sommes d'avis qu'elle n'est pas recevable et que la DECPP ne
devrait pas en tenir compte dans la présente révision.
Une
méthodologie insuffisante
Tout d’abord, nous constatons que le
taux de réponse à ce sondage est plutôt faible (34,47%), ce qui est à notre
avis plutôt inquiétant. Il l’est particulièrement pour les trois universités
anglophones où un grand total de cinq répondants.es a participé au sondage, ce
qui représente un taux de réponse de 8,77%. De plus, on ignore qui sont les
répondants.es à ce sondage: professeurs.es, administrateurs.trices,
directeurs.trices de département, secrétaires administratifs.ves ? Quelle
crédibilité ont les résultats lorsque la participation est sur une base
volontaire ? Est-ce que les personnes répondantes à ce sondage
connaissaient bien le programme de Sciences humaines ? Étaient-elles au
courant des différents profils entre les cégeps ? Hélas, nous n’en avons
aucune idée et seul l’auteur semble détenir ces informations pourtant
essentielles à l’interprétation des résultats. En plénière lors d’une
présentation le 4 novembre 2016 à Saint-Augustin-de-Desmaures devant les
coordonnateurs.trices de Sciences humaines de la province, celui-ci a
explicitement refusé de fournir ces informations en se réfugiant derrière la
notion de confidentialité.
L’importance de maîtriser des
habiletés méthodologiques afin d’être préparé aux études universitaires est
mise de l’avant dans ce rapport. Pour cette raison, nous offrons à l’auteur de
l’étude de venir suivre les cours Initiation
pratique à la méthodologie des sciences humaines (IPMSH) et Démarche d’intégration des acquis en
sciences humaines (DIASH) dans lesquels nous enseignons à nos étudiants.es
quelle méthode est la plus appropriée selon l’objectif recherché.
De fait, compte tenu des enjeux et de
la visée de l’étude, il nous semble qu’il aurait été plus approprié d’utiliser
une méthode de type descriptive.
Le
manque de valorisation de la formation en Sciences humaines
Un autre problème important de l’étude
est qu’elle considère comme homogène une population étudiante hétérogène. Pour
entrer à l’université en Sciences humaines, il n’est pas obligatoire de détenir
un DEC en Sciences humaines. Étonnamment, 92,86% des répondants.es à ce sondage
affirment que la personne détentrice d’un DEC d’un autre programme est en
mesure de réussir ses études dans un programme universitaire en Sciences
humaines ou sociales. De plus, seulement 54,93% des répondants.es estiment que
le DEC en Sciences humaines est celui qui prépare le mieux à l’université. Or,
une partie des étudiants.es admis.es n’aura jamais bénéficié de cette
formation, faute d’avoir obtenu un diplôme collégial en Sciences humaines !
C’est un problème fondamental. Il aurait fallu à tout le moins que les
répondants.es puissent faire la distinction entre les étudiants.es qui ont
suivi cette formation et les autres. C'est une faute méthodologique de taille.
Des
attentes imprécises, voire utopiques
Un profil d’étudiant.e est donc
attendu, mais qu’en est-il réellement ? Plusieurs éléments du rapport
pointent du doigt un problème qui n’a pas de lien direct avec la formation
offerte en Sciences humaines au cégep. La maîtrise de la langue et de la
numératie sont nommées comme problématiques principales chez les étudiants.es
universitaires. Pourtant, ils et elles ont bien réussi leurs examens de fin de
secondaire. Des lacunes sont donc observées, mais est-il réaliste de pointer le
réseau collégial comment étant seul responsable de cette situation ? D’autre
part, des savoirs-être tels l’ouverture, la curiosité, l’esprit d’entraide, le
respect, l’éthique, l’engagement et la rigueur sont nommés comme étant
essentiels à la formation des étudiants.es en Sciences humaines. Nous sommes
d’accord, ils sont importants et nous contribuons déjà à leur développement,
notamment dans le cours porteur de l’épreuve synthèse en Sciences humaines. Mais
est-ce la seule responsabilité des cégeps ? Comment opérationnaliser ces
volontés spécifiquement, considérant qu’elles dépassent le cadre même de nos
institutions ?
Une
réelle mise en valeur
Les problèmes soulevés dans le
document sont importants. Nous demandons à la DECPP de le considérer comme nul
et de ne pas s'appuyer sur ses résultats dans la présente révision du programme
des Sciences humaines.
Les professeurs.es de Sciences
humaines au cégep sont bien outillés.es pour connaître les besoins des
étudiants.es. La plupart d'entre nous détiennent une maîtrise ou un doctorat.
Plusieurs font de la recherche. Nous reconnaissons qu’une solide formation en
méthodologie est importante pour entreprendre des études universitaires. Mais
cette méthodologie doit être particulièrement exemplaire lorsqu'on cherche à réviser
un programme d'étude à l’échelle provinciale. Il aurait été souhaitable et
fondamental que la DECPP nous consulte en amont de ce chantier si important. Nous
espérons que cette révision ait lieu sur la base d'un savoir scientifique et
d'une réelle mise en valeur des cégeps comme institutions d'enseignement.
Fait à Longueuil, le 20 février
2017
Ann
Edwards
coordonnatrice du programme de Sciences humaines
et professeure d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
coordonnatrice du programme de Sciences humaines
et professeure d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
Christiane
Mignault
professeure d’anthropologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure d’anthropologie, Cégep Édouard-Montpetit
Bruno
Massé
professeur de géographie, Cégep Édouard-Montpetit
professeur de géographie, Cégep Édouard-Montpetit
Hervé
Genge
professeur de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeur de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
François
Lalonde
professeur de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeur de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Valérie
Blanc
professeure d’histoire, Cégep Édouard-Montpetit
professeure d’histoire, Cégep Édouard-Montpetit
Daniel
Ayala
professeur d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
professeur d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
France
L. Renaud
professeure d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
Jean-Pascal
Larin
professeur de sciences politiques, Cégep Édouard-Montpetit
professeur de sciences politiques, Cégep Édouard-Montpetit
Martin
Geoffroy
professeur de sociologie et directeur du Centre d’expertise
et de formation sur les intégrismes religieux, Cégep Édouard-Montpetit
professeur de sociologie et directeur du Centre d’expertise
et de formation sur les intégrismes religieux, Cégep Édouard-Montpetit
Jean-Nicolas
Pépin
professeur de mathématiques, Cégep Édouard-Montpetit
professeur de mathématiques, Cégep Édouard-Montpetit
Nathalie
Malo
professeure d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
Diane
Bond
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Louise
Bourbonnais
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Janie
Duchesnau
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Josée
Fiset
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Nathalie
Fréchette
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Annie
Guillemette
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Chantale
Lavoie
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Anne
Leblond
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Paul
Morissette
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Line
Rainville
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Emmanuelle
Roy
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Sabine
Sèvre Rousseau
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Jade
Vandenbossche-Makombo
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Diane
Venne
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Johanne
Yorksie
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de psychologie, Cégep Édouard-Montpetit
Stéphanie
Chatigny
professeure d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
Éveline
Bousquet
professeure d’histoire, Cégep Édouard-Montpetit
professeure d’histoire, Cégep Édouard-Montpetit
Lysanne
Couture
professeure de sociologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de sociologie, Cégep Édouard-Montpetit
Mikhaël
Dupuis
professeur d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
professeur d’économie, Cégep Édouard-Montpetit
Marie
Wright-Laflamme
professeure de sociologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeure de sociologie, Cégep Édouard-Montpetit
Louis
Roy
professeur d’anthropologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeur d’anthropologie, Cégep Édouard-Montpetit
Manuel
Sépulvéda
professeur d’anthropologie, Cégep Édouard-Montpetit
professeur d’anthropologie, Cégep Édouard-Montpetit
Louis
Lafrenière
professeur d’histoire, Cégep Édouard-Montpetit
professeur d’histoire, Cégep Édouard-Montpetit
Luc
Giroux
professeur d’histoire, Cégep Édouard-Montpetit
professeur d’histoire, Cégep Édouard-Montpetit
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