LE QUÉBEC ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE
L’amélioration se manifeste par le changement.
Le Québec peut être fier d’avoir eu, pendant 9 ans, un gouvernement qui a fait preuve d’ouverture face au développement durable : il a fait adopter à l’unanimité la Loi sur le développement durable (2006), il a amélioré les lois et règlements sur la gestion des matières résiduelles ainsi que les normes d’émissions de gaz à effet de serre pour les véhicules automobiles, etc. Bref, sur papier, nous avions une bonne équipe cependant la mise en œuvre et l’application de ces nouveautés législatives se sont avérées plutôt floues, voire même discrétionnaires. Bien qu’il ait disposé de tout le temps et la latitude nécessaire, le gouvernement aurait pu passer davantage de la parole aux actes.
Le nouveau gouvernement, quoique minoritaire, a démontré dès le début de son mandat une détermination remarquable à bien vouloir appliquer les trois piliers du développement durable. En effectuant un virage à 1800, cette nouvelle gouvernance prend le beau risque d’essayer de combler les besoins de la société québécoise sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire les leurs, et ce, autant au niveau environnemental, social qu’économique.
De prime abord, quel honorable cadeau que de sortir une nation du nucléaire! N’oublions pas que Gentilly-II a déjà généré des milliers de tonnes de déchets radioactifs entreposés sur place et dont la durée de vie dangereuse se calcule quelques fois en dizaines de milliers d’années. Une réfection estimée à 4,3G$ afin de préserver 800 emplois??? Le calcul est simple : 5 375 000$ par emploi sauvé! En avons-nous les moyens et surtout en avons-nous réellement besoin? Cette centrale, arrêtée depuis juillet dernier suite à de nombreuses fuites d’eau lourde, ne représentait que 3% de l’électricité québécoise.
Il faut également souligner la tout aussi responsable décision d’interdire toute exploration et exploitation du gaz de schiste. Ces activités auraient définitivement contaminé des quantités pharaoniques d’eau et mis du même coup en péril les sources d’approvisionnement en eau potable de la population autant en qualité qu’en quantité. Toutefois, puisque les problèmes de contamination déjà identifiés ailleurs dans le monde sont davantage liés à la technique d’exploitation qu’à la ressource elle-même, le moratoire imminent devrait, en plus d’interdire l’exploration et l’exploitation de cette ressource fossile, empêcher toute fracturation hydraulique sur le territoire québécois.
Que dire maintenant de la mine Jeffrey? Il faut se rappeler que le 18 janvier 2011 les directions de la santé publique (DSP) des 18 régions sociosanitaires du Québec répétaient à monsieur Clément Gignac l’existence du lien causal scientifiquement reconnu entre l’exposition à l’amiante chrysotile et l’incidence de l’amiantose, du mésiothéliome et du cancer du poumon. Combinée avec le désir de l’Organisation Mondiale de la Santé de bannir cette substance fibrogène et cancérogène, cette recommandation de la DSP aurait dû inciter l’ancien gouvernement à annuler la garantie de prêt de 58M$ promis à la mine. Et pourtant! Il a fallu attendre le changement de garde du 4 septembre dernier pour voir nos élus prendre cette décision, difficile certes, mais combien salvatrice pour tout humain digne de ce nom.
Du point de vue social, le nouveau gouvernement s’est empressé, à notre grand soulagement, d’écouter la position des étudiants, indignés par une augmentation sauvage de 75% des frais de scolarité en 5 ans et d’abroger la loi 12 qui, selon la Commission des droits de la personne, « portait atteinte […] aux libertés de conscience, d’opinion, d’expression, de réunion pacifique et d’association » énoncées dans la Charte. En conjuguant cette mesure à la disparition graduelle de la taxe santé de 200$ par année, il appert que nos élus cherchent vraiment à diminuer les inégalités sociales plutôt qu’à les exacerber.
Le poids de ces mesures sociales et environnementales sera assumé par la frange de la société civile la plus apte à le faire : les mieux nantis. Pour ceux et celles gagnant plus de 130 000$ par année, le taux d’imposition passerait de 24% à 28% tandis que pour ceux et celles dont le revenu annuel dépasse le quart de million de dollars, ce taux serait fixé à 31%.
En ajoutant ces mesures à une révision du calcul des redevances minières, on peut s’attendre à ce que ces annonces ne fassent pas l’unanimité. Combien seront-ils à revendiquer le titre de riches indignés? Aucune idée, mais ils seront sûrement moins nombreux que les étudiants du «printemps érable» et que les indignés du printemps dernier. Néanmoins, il ne faut pas sous-estimer le pouvoir qu’ont ces gens à conserver pour eux la richesse qui devrait être mieux répartie et surtout qui ne devrait pas provenir d’une détérioration éhontée de notre écosystème.
Quand un changement vise à améliorer le sort d’une majorité nécessiteuse au détriment d’une minorité déjà grassement sclérosée en respectant davantage notre écosystème, il mérite au moins d’être encouragé.
Marie-Claude Pelchat, philosophie CBA
Nicolas Rochette, mathématiques, CBA
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